La Cour d'appel de Versailles confirme la condamnation de l'hébergeur OVH
Intéressant pour introduire le thème GPA
CA Versailles 13 octobre 2020 n° RG 19/02573, SAS OVH C/ Association JURISTES POUR L’ENFANCE Société SUBROGALIA SL
Condamné en mars, l’hébergeur d’un site Internet qui proposait des services de GPA, illicites en France, avait fait appel de cette décision. La cour d’appel de Versailles vient de confirmer le jugement dans un arrêt qui devrait faire jurisprudence selon l’association Juristes pour l’enfance (JPE). La société OVH, hébergeur du site Subrogalia, doit, de fait, le « rendre inaccessible sur le territoire français », car sa responsabilité est engagée dès lors qu’il a été mis au courant du contenu illicite du site.
« Cette décision est importante, car elle dit clairement que le contenu d’un tel site proposant au public français des prestations de GPA est « manifestement illicite » (et non pas seulement « illicite »), ce qui oblige l’hébergeur à le retirer dès lors qu’il est mis en demeure de le faire », commente JPE, qui annonce également entamer les mêmes démarches concernant des sites similaires.
- Le caractère illicite du site est établi par le fait que la prestation proposée par le site est bien une prestation d’entremise « entre une personne ou un couple désireux d’accueillir un enfant et une femme acceptant de porter en elle cet enfant en vue de le leur remettre » (faits réprimés par l’article 227-12 du Code pénal) ; le caractère habituel de l’entremise est établi par le nombre de clients revendiqués, le caractère lucratif n’étant pas davantage contestable (« packs qui ont un prix fixe »). La Cour relève en outre que le site est destiné à un public situé en France où la GPA est illicite et l’entremise interdite. Elle en en déduit ainsi que le site est illicite en France.
- Ensuite, la Cour se prononce sur la responsabilité de la société OVH, hébergeur. Si la loi de 2004 pose un principe d’irresponsabilité de l’hébergeur quant au contenu des sites hébergés, cette irresponsabilité s’efface lorsqu’il a connaissance de l’activité ou de l’information illicite et qu’il n’agit pas pour retirer ces informations ou en rendre l’accès impossible. La connaissance des faits litigieux est présumée acquise par l’hébergeur lorsqu’il reçoit notification de différents éléments énumérés par la loi (LCEN, art. 6.I.5). Le Conseil Constitutionnel a précisé dans sa décision du 10 juin 2004 que la responsabilité de l’hébergeur ne peut être engagée si l’information dénoncée comme illicite ne présente pas manifestement un tel caractère.
La Cour établit que le caractère « manifestement illicite » du site s’apprécie par rapport à la loi française et non à celle du lieu de résidence de l’éditeur du site, la loi se référant aux contenus et non à leur émission, et qu’il ne peut être que la conséquence d’un manquement délibéré à une disposition de droit positif explicite et dénuée d’ambiguïté.
Cet arrêt, qui a des allures d’arrêt de principe sur cette question, devrait faire jurisprudence.